1815 : La défaite de Waterloo scelle l’Empire

Illustration Napoléon par Auguste Raffet 16_9

En 1815, la petite ville de Waterloo, située dans l’actuelle Belgique, devient le théâtre d’une bataille décisive qui changera le cours de l’histoire. La défaite de Napoléon Bonaparte lors de cet affrontement met fin à l’Empire français et marque un tournant majeur en Europe. Quels sont les évènements qui ont conduit à cette journée cruciale ?

Comprendre l’Empire

Avant l’avènement de l’Empire, la France est secouée par la Révolution de 1789. Les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité bouleversent l’ordre établi. Le peuple se soulève contre la monarchie absolue de Louis XVI, entraînant la chute de l’Ancien Régime. La prise de la Bastille le 14 juillet 1789 symbolise ce vent de changement qui souffle sur le pays.

La Révolution instaure de nouvelles institutions, mais aussi une période d’instabilité. Les guerres révolutionnaires opposent la France aux monarchies européennes inquiètes de la propagation des idées révolutionnaires. C’est dans ce contexte que Napoléon Bonaparte, jeune général corse né le 15 août 1769, se distingue par ses talents militaires. À seulement 24 ans, il est promu général de brigade après le siège de Toulon en 1793.

Ambitieux et charismatique, Napoléon enchaîne les victoires. En 1796, à la tête de l’armée d’Italie, il défait les forces autrichiennes et piémontaises lors des batailles de Lodi, Arcole et Rivoli. Ses succès militaires le propulsent sur le devant de la scène politique française.

En 1799, profitant du climat d’instabilité du Directoire, il orchestre le coup d’État du 18 brumaire et devient Premier Consul. Il entame alors une profonde réorganisation de la France. La création de la Banque de France en 1800, l’instauration du franc germinal en 1803 et la promulgation du Code civil en 1804 sont autant de réformes qui modernisent le pays.

Baguette Chaudron

L’apogée de l’Empire

Le 2 décembre 1804, dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, Napoléon se couronne lui-même Empereur des Français, en présence du pape Pie VII. Il démontre sa volonté de concentrer le pouvoir entre ses mains tout en affirmant l’indépendance de la France face à l’Église.

Il poursuit ses réformes en créant les lycées, en signant le Concordat de 1801 qui rétablit le culte catholique, et en modernisant l’administration. Sur le plan militaire, Napoléon étend l’influence française sur une grande partie de l’Europe. Ses victoires à Austerlitz en 1805, où il défait les armées russes et autrichiennes, puis à Iéna en 1806 contre la Prusse, renforcent son prestige.

Le Blocus continental, décrété en 1806, vise à affaiblir l’économie britannique en interdisant le commerce avec le continent européen. Néanmoins, cette mesure provoque des tensions avec les pays alliés et nuit à l’économie française. En 1807, après la victoire de Friedland, le traité de Tilsit est signé avec le tsar Alexandre Ier, partageant l’Europe de l’Est entre la France et la Russie.

Malgré son pouvoir grandissant, Napoléon rencontre des résistances. En Espagne, l’installation de son frère Joseph sur le trône en 1808 déclenche une insurrection nationale soutenue par le Royaume-Uni. La guerre d’Espagne s’enlise et devient un gouffre pour les ressources françaises.

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Le déclin de l’Empire

Les premières fissures de l’Empire apparaissent. En 1810, le divorce de Napoléon avec Joséphine de Beauharnais et son remariage avec Marie-Louise d’Autriche marquent une tentative de renforcer les liens avec les monarchies européennes. La naissance de son fils, le Roi de Rome, en 1811, ne suffit pas à consolider sa position.

La rupture avec la Russie devient inévitable lorsque le tsar Alexandre Ier refuse de se plier au Blocus continental. En juin 1812, Napoléon lance la Grande Armée, forte de 600 000 hommes, dans une campagne vers Moscou. Les Russes adoptent une stratégie de la terre brûlée, reculant sans cesse et privant les Français de ravitaillement.

La bataille de la Moskova, le 7 septembre 1812, est l’une des plus sanglantes. Malgré une victoire tactique, Napoléon ne parvient pas à anéantir l’armée russe. L’incendie de Moscou, que l’Empereur occupe le 14 septembre, le prive d’un abri et de ressources pour l’hiver. Face à l’absence de reddition du tsar, il ordonne la retraite le 19 octobre.

Cette retraite tourne au cauchemar. Le froid glacial, la faim et les attaques des cosaques déciment les troupes. Sur les 600 000 soldats partis, moins de 30 000 repassent le Niémen. Ce désastre militaire ébranle l’Empire et encourage les nations européennes à se liguer contre Napoléon.

En 1813, lors de la bataille de Leipzig, surnommée la « bataille des Nations », les forces alliées infligent une défaite sévère à Napoléon. Il est contraint de se replier sur la France. Malgré une campagne de France en 1814 où il démontre encore son génie militaire, il ne peut empêcher l’invasion alliée.

Le 31 mars 1814, les troupes coalisées entrent dans Paris. Sous la pression, Napoléon abdique le 6 avril à Fontainebleau. Exilé sur l’île d’Elbe, il conserve le titre d’Empereur mais sur un territoire réduit et sous surveillance.

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Waterloo, échec et mat

L’exil sur l’île d’Elbe ne parvient pas à éteindre la flamme de Napoléon. Pendant son séjour, il observe attentivement la situation en France. Le retour de la monarchie avec Louis XVIII est loin de satisfaire la population. Les idéaux de la Révolution sont menacés, les anciens nobles récupèrent leurs privilèges, et une atmosphère de mécontentement général règne dans le pays. Les soldats de l’ancienne Grande Armée sont démobilisés, sans travail ni reconnaissance. Ce climat offre à Napoléon l’opportunité de reprendre le pouvoir.

Le 26 février 1815, profitant de la négligence des gardes britanniques, Napoléon s’échappe de l’île d’Elbe à bord du navire « L’Inconstant », accompagné de quelques centaines de fidèles. Il débarque à Golfe-Juan le 1er mars 1815. Commence alors une marche audacieuse vers Paris, connue sous le nom de « Vol de l’Aigle ». Sans tirer un seul coup de feu, il traverse la France, acclamé par les foules.

Le maréchal Ney, initialement chargé de capturer Napoléon, déclare devant ses soldats : « Soldats ! L’Empereur est devant vous. Vive l’Empereur ! » Le 20 mars, Napoléon entre triomphalement à Paris, tandis que Louis XVIII fuit la capitale. Ce retour spectaculaire marque le début des « Cent-Jours ».

Conscient que son pouvoir est fragile, Napoléon tente de rassurer les nations européennes en proclamant son désir de paix. Il propose une constitution plus libérale. Il espère ainsi rallier les libéraux et apaiser les tensions internes. Toutefois, les souverains européens ne sont pas dupes. Le 13 mars 1815, le Congrès de Vienne déclare Napoléon « hors la loi », et les puissances coalisées commencent à mobiliser leurs armées.

Face à la menace imminente, Napoléon décide de prendre l’initiative. Il dispose d’une armée de 125 000 hommes, rapidement constituée à partir des vétérans et des nouvelles recrues. Son plan est audacieux : attaquer les forces britanniques et prussiennes en Belgique avant qu’elles ne puissent se regrouper avec les autres contingents alliés. Il espère ainsi répéter les succès de ses campagnes passées en divisant ses ennemis.

Le 15 juin 1815, l’armée française franchit la frontière belge. Le 16 juin, Napoléon remporte une victoire tactique à Ligny contre les Prussiens du maréchal Blücher. Néanmoins, il ne parvient pas à les détruire complètement. Dans le même temps, le maréchal Ney affronte les Britanniques à Quatre-Bras, mais ne parvient pas à les empêcher de se replier en bon ordre.

Le 18 juin 1815, sous un ciel menaçant et un terrain boueux dû aux pluies torrentielles de la veille, la bataille décisive se prépare à Waterloo. Napoléon dispose d’environ 72 000 hommes et 250 canons. Face à lui, le duc de Wellington aligne 68 000 hommes et 156 canons, positionnés sur une crête stratégique.

Dès le début, des retards nuisent au plan de Napoléon. Le terrain détrempé empêche l’artillerie de se déployer efficacement. L’Empereur retarde l’assaut principal pour laisser le sol sécher, perdant ainsi de précieuses heures. Pendant ce temps, Wellington renforce ses positions.

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Vers 16 heures, croyant apercevoir un signe de retraite chez les Britanniques, le maréchal Ney lance une charge massive de cavalerie sans le soutien de l’infanterie ni de l’artillerie. Les cuirassiers français se heurtent aux carrés d’infanterie britannique, bien formés et disciplinés. Les charges se succèdent pendant près de deux heures, causant de lourdes pertes mais sans briser les lignes ennemies.

Pendant ce temps, les Prussiens approchent. Le maréchal Grouchy, chargé par Napoléon de poursuivre les forces prussiennes après Ligny, a échoué à les contenir. Ignorant les ordres de l’Empereur, il n’a pas dévié sa route pour venir en aide sur le champ de bataille de Waterloo. À partir de 17 heures, les premiers éléments prussiens commencent à engager le flanc droit français.

Napoléon décide alors de lancer sa Garde impériale, ses troupes d’élite, dans une ultime tentative pour percer les lignes alliées. Les soldats de la Garde, réputés invincibles, avancent sous les acclamations. Mais cette fois, la chance a tourné. Les feux nourris de l’infanterie et de l’artillerie britanniques déciment leurs rangs. La Garde recule, et pour la première fois, la panique s’empare des troupes françaises.

Lorsque les Britanniques somment le général français Cambronne de se rendre, il répond par un mot devenu célèbre : « La Garde meurt mais ne se rend pas ! » La déroute est inévitable. Les soldats français fuient le champ de bataille, poursuivis par les forces alliées. Napoléon tente de rallier ses hommes, mais le chaos est trop grand. Il quitte le champ de bataille et retourne à Paris, abattu.

Les pertes sont lourdes pour les deux factions : environ 25 000 morts, blessés ou disparus pour les Français, et près de 22 000 pour les Alliés. Cette défaite scelle le sort de Napoléon et de l’Empire.

De retour à Paris, Napoléon se heurte à l’opposition du gouvernement et des Chambres, qui le pressent d’abdiquer pour éviter une nouvelle occupation étrangère. Le 22 juin 1815, il abdique en faveur de son fils, le Roi de Rome, mais cette décision n’a aucun effet. Les Alliés refusent tout compromis.

Napoléon envisage un moment de partir aux États-Unis, mais la flotte britannique contrôle les mers. Le 15 juillet 1815, il se rend à bord du navire HMS Bellerophon, espérant obtenir un traitement honorable de la part des Britanniques. Toutefois, le gouvernement britannique, craignant son retour, décide de l’exiler sur l’île de Sainte-Hélène, une possession britannique isolée dans l’Atlantique Sud.

À Sainte-Hélène, Napoléon vit sous la surveillance stricte du gouverneur Hudson Lowe, qui lui impose des restrictions sévères. Installé à Longwood House, une résidence humide et insalubre, il passe ses journées à dicter ses mémoires à ses fidèles compagnons, dont le général Bertrand et le comte de Las Cases. Il rédige notamment le « Mémorial de Sainte-Hélène », où il retrace sa vie et ses campagnes, cherchant à façonner son héritage et son image pour la postérité.

Sa santé décline rapidement. Il souffre de douleurs abdominales, probablement dues à un cancer de l’estomac, la même maladie qui a emporté son père. Le 5 mai 1821, après une longue agonie, Napoléon s’éteint à l’âge de 51 ans.

Baguette Napoléon

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