Pourquoi « gauche » et « droite » en politique ?
Pourquoi parle-t-on de « gauche » et de « droite » en politique, et surtout en France ? Ces termes trouvent leur origine dans un moment clé de l’histoire française, lors de la Révolution de 1789.
Ces simples mots, devenus universels, viennent d’un bouleversement dans la société et la manière dont on a organisé le pouvoir à cette époque.
La France en 1789 : une marmite en pleine ébullition
En 1789, la France est en pleine effervescence. La monarchie absolue, qui domine le pays depuis des siècles, vacille. Louis XVI est sur le trône, mais le peuple gronde. Les inégalités sociales sont énormes : la noblesse et le clergé détiennent des privilèges puissants, alors que la majorité de la population vit dans des conditions difficiles. Le pays est également en crise financière, après des années de guerre coûteuse, notamment la participation à la Guerre d’indépendance américaine. C’est dans ce contexte explosif que la Révolution éclate.
Le 5 mai 1789, Louis XVI convoque les États généraux pour résoudre la crise. Les États généraux regroupent trois ordres : le clergé, la noblesse et le Tiers-État (composé de la bourgeoisie et du peuple). C’est lors de ces réunions, à l’Assemblée nationale constituante, que l’origine des termes « gauche » et « droite » voit le jour.
L’apparition des forces de gauche et de droite
Lors des premières séances des États généraux, une division claire se forme. Les députés favorables au roi, à la monarchie et à l’ordre établi se placent à droite du président de l’Assemblée. Ceux qui veulent des changements radicaux, notamment les représentants du Tiers-État, se placent à gauche. Ce positionnement, au départ géographique, va rapidement symboliser des visions politiques opposées.
La « gauche » représente alors les idées nouvelles : plus de libertés pour le peuple, la fin des privilèges et l’égalité. Les députés de gauche sont pour la plupart issus du Tiers-État, notamment de la bourgeoisie. Ils sont influencés par des idées révolutionnaires, comme celles de Robespierre. À l’opposé, la « droite » incarne la défense des traditions, de la religion et du pouvoir royal. Les députés de droite sont principalement des nobles et des clercs, qui veulent maintenir l’ordre ancien.
Deux figures originales
Du côté de la gauche, Robespierre est une figure clé de la Révolution française. Défenseur passionné d’une République égalitaire, il veut que le pouvoir soit dans les mains du peuple, et non d’une élite ou d’un roi. En 1792, il joue un rôle central dans la création de la Première République, marquant la fin officielle de la monarchie en France. Il pousse pour des réformes radicales, comme l’abolition de l’esclavage en 1794, mais son recours à la violence pendant la Terreur le rend de plus en plus impopulaire. Convaincu que la terreur est nécessaire pour protéger la République, il finit par être arrêté et exécuté en 1794.
Du côté de la droite, Mirabeau adopte une position plus modérée. Noble d’origine, mais membre du Tiers-État, il plaide pour une monarchie constitutionnelle, où le pouvoir serait partagé entre le roi et une assemblée élue. Inspiré par le modèle britannique, il pense qu’une transition progressive éviterait le chaos. Orateur talentueux, il devient une figure influente, cherchant à concilier réformes et stabilité. Malgré ses efforts, il ne pourra pas empêcher l’effondrement de la monarchie.
Deux siècles d’évolution pour la gauche et la droite
Le clivage gauche-droite évolue au XIXe siècle avec la Révolution de 1848 et la Deuxième République. La gauche représente les républicains et socialistes, défendant la laïcité et la démocratie, tandis que la droite reste fidèle aux traditions monarchistes et conservatrices. Des figures comme Gambetta pour la gauche, et l’adaptation de la droite à la République, marquent cette période.
Au XXe siècle, la gauche se divise avec l’arrivée des mouvements communistes, tandis que la droite, avec de Gaulle, devient plus républicaine. Après 1945, la gauche se concentre sur l’État-providence, la droite sur le libéralisme économique. Au XXIe siècle, les frontières s’effacent : la gauche perd son ancrage ouvrier, la droite s’éloigne du conservatisme traditionnel. Mais le débat entre changement et ordre, né en 1789, persiste.